Cette maladresse linguistique, qui consiste à marier ensemble (vous l’avez repérée celle-là ?) deux mots ayant la même signification, est assez fréquente. Et vous trouverez toujours en face de vous un puriste ravi de vous remonter les bretelles. On vous file le kit anti-pléonasme :
Dans la série « crispante »
Au jour d’aujourd’hui
Aujourd’hui étant déjà lui-même un pléonasme admis (hui signifiant en ce jour), dire “au jour d’aujourd’hui” c’est effectuer un triple pléonasme. Ça s’appelle aussi une tautologie en rhétorique (répétition inutile, volontaire ou involontaire d’une même idée en différents termes).
Monter en haut
Tout comme descendre en bas, on se doute que si vous montez c’est par le haut.
Moi, personnellement, je . . . :
On l’entend généralement beaucoup chez les gens qui vous coupent la parole pour vous raconter leur histoire. Vous pouvez leur dire que moi + personnellement + je = triple pléonasme et gros ego boursouflé.
Comme par exemple
Locution pléonastique assez retorse, “comme par exemple” introduit deux fois l’exemple. Mais cela peut aussi suggérer une forme d’insistance (vous savez, quand vous insistiez comme quand, par exemple, je vous disais que oui, c’était un pléonasme). Donc à utiliser avec précaution au risque de vous faire taper sur les doigts par les méchants puristes de la langue française.
Marcher à pied
Il fut une époque lointaine où on marchait aussi avec nos mains, mais elle semble bien heureusement révolue. Plus besoin de se distinguer du primate, aujourd’hui quand on marche c’est bien sûr avec ses pieds.
Je l’ai vu de mes yeux
Même chose que pour marcher à pied, l’action voir implique nécessairement l’œil, donc on évite de passer pour des idiots en supprimant « de mes yeux », sauf si on s’appelle Molière et qu’on a écrit le Tartuffe.
Dans la série « courante »
Un bel avenir devant soi
L’avenir est forcément devant, donc inutile de le repréciser. Mais ce pléonasme est presque devenu une expression, on l’entend partout.
Opportunité à saisir
Une opportunité signifie déjà une occasion à saisir, donc on peut profiter d’une opportunité mais on ne la saisira pas deux fois.
Rentrer à l’intérieur/ Sortir dehors
C’est courant, classique mais on a toujours l’air un peu idiot quand on annonce à l’assemblée qu’on sort dehors et qu’on se fait reprendre par tout le monde.
S’avérer vrai
S’avérer donne déjà le principe de vérité. En fait, c’est s’avérer faux qui est une aberration linguistique, et qu’on entend pourtant tous les jours dans les médias.
Vivre sa vie
Oui parce que c’est un peu compliqué de vivre sa mort. Mais encore une fois, ce pléonasme est aujourd’hui devenu une expression commune très (trop ?) tolérée.
Saupoudrer de sel
Si le verbe saupoudrer signifie aujourd’hui et depuis des siècles répandre, disperser, parsemer une substance poudreuse, étymologiquement et dans son sens strict, il signifie poudrer de sel (du latin “sal” et de “poudrer”).
« Saupoudrer de sucre » (ou de farine) devrait donc n’avoir aucun sens, de même que « saupoudrer de sel » devrait être considéré comme un pléonasme. Mais bon, comme le langage vit des heures troubles depuis TopChef (« Je vais partir sur un navet »), tout le monde admet tacitement qu’on peut saupoudrer n’importe quoi.
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