Cafés associatifs, épiceries solidaires, friperies, boutiques d’occasions etc… Dans un monde en constante mutation, les nouveaux modèles économiques parallèles n’ont de cesse de voir le jour et de s’adapter. Et là-dessus, le marché du livre ne fait pas exception et sait lui aussi se réinventer.
La vitalité de nos librairies
Il n’est pas rare de tomber sur des articles ou d’entendre parler ça et là de librairies qui ferment leurs portes. Mais en réalité, contrairement à ce que l’on pourrait croire, le monde de la librairie reste très florissant. En 2022, la France a même atteint un record d’ouvertures de librairies : 142 nouveaux établissements ont vu le jour. Et ces deux dernières années, ils étaient 250 nouveaux libraires sur le territoire, presqu’autant que sur les cinq années précédentes. La crise sanitaire et le confinement sont passés par là, de nombreuses personnes se sont reconverties et ont eu envie de se lancer dans le secteur du livre; un secteur ayant retrouvé ses lettres de noblesse en passant à l’époque dans la catégorie des « produits de première nécessité » !
La concurrence du livre sur le web
Mais il reste une ombre au tableau… l’ennemi juré du libraire marche toujours dans son sillon : le web. Eh oui, commander en ligne les dernières nouveautés tout en restant assis tranquillement sur son canapé reste, hélas, très tentant pour beaucoup d’entre nous. À ce propos la loi Darcos, visant à aider les libraires, est entrée en application le 7 octobre dernier. Cette loi, nous la devons à la sénatrice du même nom, Laure Darcos, femme de l’ancien ministre de l’éducation Xavier Darcos, qui avait lancé ce projet en 2020. Elle doit « conforter l’économie du livre et renforcer l’équité et la confiance entre ses acteurs » en imposant des frais de livraison d’un montant de 3 euros pour toute commande inférieure à 35 euros et contenant au moins un livre neuf. Un bon moyen, en théorie, de favoriser les achats chez les libraires indépendants et de les aider à lutter contre cette concurrence quelque peu déloyale (les frais de livraison dans l’industrie du livre étant souvent offerts ou d’un coût très bas). Cependant la loi ne fait pas l’unanimité et est jugée insuffisante par beaucoup pour tout un tas de raisons. Quoiqu’il en soit, le vrai hic reste que… achat physique ou en ligne, c’est le même problème : beaucoup de français vont devoir se restreindre, et se voir privés de culture, l’inflation actuelle réduisant considérablement leur pouvoir d’achat. Pas sûr que les livres soient la priorité de tous en ces temps.
Le nouveau modèle de la librairie solidaire
Fort heureusement, de nombreuses librairies et même de grandes enseignes offrent des alternatives en proposant régulièrement l’acquisition de livres d’occasion. Et, dans ce marché, un nouvel acteur a fait son apparition ces dernières années : c’est la libraire sociale et solidaire. En plus de promouvoir l’accès à la culture pour tous en proposant des livres à très bas prix, voire gratuits, elle s’inscrit dans le plus large concept d’économie sociale et solidaire et de véritable démarche citoyenne. Gérées de manière démocratique et participative, les libraires solidaires sont souvent le fruit d’initiatives locales, et souvent dans des lieux délaissés par les acteurs de la culture. Mais, encore peu nombreuses, on peut heureusement également en trouver en ligne. Les récupérations d’ouvrages se font grâce aux dons de particuliers et d’entreprises, et de collectes auprès de bibliothèques, de recycleries et d’associations.
Et, grâce à des partenariats de type associatif, certaines de ces librairies peuvent aussi aider au soutien des personnes fragiles, au retour à l’emploi des personnes en situation précaire ou d’exclusion, ou encore lutter contre l’illettrisme. Bref, ce sont de véritables lieux de vie, de développement de lien social et d’économie circulaire et écologique.
D’utilité sociale et s’inscrivant dans une démarche éco-responsable, ces libraires d’un nouveau genre sont donc une aubaine pour redynamiser le secteur du livre et l’accès à la culture. En espérant qu’elles seront toujours plus nombreuses à voir le jour, surtout lorsque l’on sait que 90% des communes en France n’ont pas de librairie…