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Par Armelle Klein - Le 21 septembre 2015

À quelques jours de la sortie de leur dernier numéro, nous avons rencontré Annaïg, la co-gérante de “Professeur cyclope“, un magazine de bandes dessinées numériques créé en 2013. Amateurs de BD, on vous laisse découvrir l’univers créatif de ses auteurs toujours à la recherche de nouveaux modes d’expression ! 

Nous avons vu la vague du numérique déstabiliser les acteurs de la musique, nous sentions comme beaucoup la même chose se profiler dans la bande dessinée. Annaïg 

Parlez-nous du concept de Professeur Cyclope !

Professeur Cyclope est un magazine de bandes dessinées numériques, le seul, l’unique ! Un espace de création et de diffusion pour les auteurs qui ont envie de tenter des choses dans ce média, et un espace de découverte inédit pour les lecteurs. Le magazine a existé à partir de 2013 pendant deux ans sous forme mensuelle, puis en 2015 trois numéros paraissent, en lien avec les thématiques de notre co-producteur ARTE. Le premier numéro, Asia Fantasia, est sorti en juillet, le second, Pop & Geek, est publié le 14 septembre, et le dernier, dont le thème est encore top secret, sortira en décembre.

Pourquoi avez-voulu vous lancer dans la BD sur du numérique ?

Nous avons vu la vague du numérique déstabiliser les acteurs de la musique, nous sentions comme beaucoup la même chose se profiler dans la bande dessinée. Par ailleurs, beaucoup de choses intéressantes se créaient sur les blogs BD, mais rien de fédéré ou même de rémunéré. Enfin, les négociations coinçaient entre les éditeurs et les auteurs à propos des droits numériques . . . C’était le moment de créer une initiative réfléchie et exigeante.

Quel a été votre parcours avant de vous lancer dans l’aventure ?

Les cinq fondateurs à la source du projet, Brüno, Gwen de Bonneval, Cyril Pedrosa, Hervé Tanquerelle et Fabien Vehlmann, sont des auteurs de bande dessinée reconnus et actifs depuis une vingtaine d’années. Ils ont publié plusieurs albums qui ont fait date, et ont participé à la création de la branche BD du syndicat des auteurs-compositeurs, le SNAC. Certains avaient aussi créé le site 8comics, sorte de première tentative de portail de diffusion créé par les auteurs. Pour ma part, j’avais travaillé aux éditions Glénat comme conceptrice-rédactrice, et c’est lorsque j’ai parlé à Fabien Vehlmann de mon mémoire de fin d’études sur la bande dessinée numérique qu’il m’a embarquée dans ce beau projet.

La BD a une histoire jeune, elle a encore un bel avenir devant elle.

Quel avenir imaginez-vous pour la BD papier ?

La bande dessinée papier n’a pas de risque de disparaître avec l’arrivée de la bande dessinée numérique : l’objet est plus constitutif de l’expérience que pour la musique. Avec Professeur Cyclope, nous n’avons jamais voulu remplacer le papier, mais proposer des alternatives. D’ailleurs, certaines des histoires publiées en numérique ont paru aussi en albums papier dans un label coédité par Casterman et Arte Editions.

Quant à la situation de la bande dessinée en tant que marché : on parle depuis quelques années de surproduction, en terme de nombre d’albums parus, et on attend avec terreur le point de saturation . . . Que tant d’albums sortent n’est pas entièrement négatif : cela permet à plus d’histoires d’éclore, à plus d’auteurs de concrétiser leurs projets. Seulement le chiffre d’affaires global n’augmente pas proportionnellement au nombre d’acteurs à rémunérer ! Du coup, comme le gâteau ne grossit pas et que le nombre de convives augmente, les parts diminuent. Difficile de prophétiser ce qui ressortira de cette situation délicate. Le risque à court ou moyen terme est que les auteurs se paupérisent, que les albums à but commercial, deviennent la règle, au détriment de la qualité des œuvres. Mais sur le long terme, je suis plus optimiste : il n’y a pas de raison qu’il n’y ait pas un jour autant de lecteurs de BD que de lecteurs de romans ou que de spectateurs de films et séries. La BD a une histoire jeune, elle a encore un bel avenir devant elle.

Avec Professeur Cyclope, nous n’avons jamais voulu remplacer le papier, mais proposer des alternatives.

Que préférez-vous dans l’entrepreneuriat ?

Le sentiment de compter, que ce que fait notre collectif apporte réellement quelque chose, de pouvoir faire avancer l’histoire de notre medium à notre idée. Une forme d’indépendance, aussi, qui a un coût mais qui est précieuse.

Qu’avez-vous appris sur vous depuis que vous êtes entrepreneur ?

À titre personnel, j’ai notamment appris à être responsable de façon transversale : garder un œil permanent à la fois sur le budget annuel, sur le suivi technologique, sur la préparation des divers numéros, sur le relationnel avec les différents partenaires . . . Cela m’a donné une confiance en moi qui me servira toute ma vie. J’ai aussi appris des choses paradoxales : tenir bon parfois, savoir montrer sa faiblesse ou fatigue à d’autres moments. On ne peut pas tout supporter en terme de responsabilités, de charge de travail, de stress, mais avant d’oser le dire aux collègues, il faut déjà se l’avouer ! Pas facile… Mais quand on se sent en confiance, c’est possible, et salvateur.

Quant au reste de l’équipe : je crois pouvoir dire que nous avons confirmé que nous étions un vrai collectif soudé, capable de garder le lien malgré les moments durs. Savoir communiquer son ressenti et sa vision des choses est capital pour la santé de l’entreprise.

Nous avons aussi appris que le recrutement était un vrai métier . . . qu’on n’a pas toujours su pratiquer avec talent !

Savoir communiquer son ressenti et sa vision des choses est capital pour la santé de l’entreprise.

Question frenchy : si vous étiez un fromage, lequel seriez-vous ?

Sans doute un fromage de chèvre, ma foi.

Un endroit en France à nous faire découvrir ?

L’île d’Ouessant évidemment, qui concentre l’essence de la Bretagne que j’aime !

Que vouliez-vous faire quand vous étiez petits ?

Je ne me souviens pas, je crois que ça changeait régulièrement . . . mais je lisais toutes les BD qui me tombaient sous la main, et si l’adulte que je suis maintenant pouvait dire son futur métier à la petite lectrice avide que j’étais, je pense que cette dernière n’y croirait même pas ! Ça lui semblerait tellement fou et irréalisable . . .

 

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