Après une “hibernation créative” d’un an, le groupe Duellum revient sur scène demain soir, vendredi 10 avril, à la Flèche d’Or. À l’occasion de ce retour, les membres ont accepté de répondre à nos nombreuses questions, nous dévoilant à 4 voix leur univers atypique entre électro-rock et influences africaines. Ils nous parlent de Baudelaire, de la frénésie de notre époque, de leurs souvenirs à Solidays ou encore de la vache qui rit ! Coup de cœur en perspective !
C’est une époque bizarre que l’on vit non ? Tout va très vite mais un peu dans tous les sens aussi. C’est de plus en plus dur de se faire une place.Jon
Présentez-nous l’univers de Duellum ? Pourquoi déjà ce nom de groupe ?
Arthur : Alors c’est plutôt simple, Duellum, c’est une sorte de matériau composite. Notre base, c’est « l’electro-rock » qui sonne relativement anglo-saxon mais par dessus, nous l’agrémentons de plein d’autres choses ; la musique africaine par exemple, qui est de plus en plus importante dans nos morceaux ou des sons éparses que nous ajoutons ça et là et qui proviennent des machines normalement faites pour faire de la techno.
Jon : Le nom Duellum . . . On l’a emprunté à ce cher Charles Baudelaire qui avait nommé un poème de la section « Spleen et Idéal » des Fleurs du Mal comme ça. Tu me diras, lui n’est certainement pas au courant du détournement que l’on a fait de son poème . . . (rires).
Fred : C’était vraiment un coup de tête ce nom. On a choisi ça en regardant l’index des Fleurs du Mal mais on pensait surtout qu’on allait le modifier une fois notre premier concert terminé. C’est le genre de choses que tu ne fais finalement jamais. Si le groupe avance, les gens t’identifient à ça et petit à petit, toi aussi tu assimiles ce nom comme étant ton identité.
Comment le groupe est-il né ?
Hugo : Le groupe est né très naturellement. Enfin, on pourrait presque dire qu’il est né sans que nous ayons fait grand chose pour qu’il naisse . . . ! C’est parti d’une petite annonce déposée par Arthur à Sciences Po. Jon y a répondu et ils ont commencé à jouer ensemble avec d’autres gens. Finalement, ça n’a pas collé avec les autres types, et ils se sont retrouvés tous les deux à monter « quelque chose ».
Fred : Jon est un ami d’enfance. Maintenant on peut dire que ça fait plus de 20 ans qu’on se connaît t’imagines . . . ? Je faisais de la musique dans un autre groupe à l’époque quand lui m’a proposé de les rejoindre avec Arthur. J’ai accepté, on a fait une première répète à trois et ça a roulé ! Hugo, nous a rejoint après une petite période sans bassiste, il sortait avec ma sœur, je n’ai pas eu à aller très loin pour le trouver ! Le line-up tel que l’on connaît maintenant, Arthur, Hugo, Jon et moi, date de 2008.
L’Afrique nous fascine énormément. Et on en parle beaucoup dans nos morceaux. […] L’Afrique, c’est un continent de génie où se concentrent tous les extrêmes. Fred
Comment votre style a-t-il évolué depuis les débuts ?
Arthur : C’est incroyable l’évolution que l’on a eue depuis tout ce temps ! Après, quand on a commencé, on n’était pas encore un fruit mûr. Quand on se revoit en 2007-2008, on avait des têtes de bambins ! On n’avait pas encore trop en tête l’idée de vivre de la musique, tout ça était bien loin. Déjà, au tout début, on chantait uniquement en français, on écrivait des textes super alambiqués, et les structures des morceaux étaient beaucoup plus brutes que maintenant.
Jon : L’évolution musicale, c’est de toute façon un processus naturel lié directement à nos vies tous les quatre. On passe notre temps à écouter de la musique et aussi à se la faire écouter. Du coup, on s’alimente les uns les autres quasi tout le temps et c’est aussi ça qui nous fait avancer. Et puis l’époque dans laquelle on évolue est tout de même assez atypique. Le flot de nouveautés est constant, mondial, et le niveau musical n’a jamais été aussi relevé qu’il ne l’est maintenant.
Hugo : Et comme le disait Jon, tout réside aussi dans le fait de se laisser un peu porter là où tes influences t’emmènent, qu’elles soient musicales, littéraires, cinématographiques, c’est la même chose. Quand nous avons sorti notre EP Drift, le titre n’était pas un hasard. On avait tous eu le sentiment d’avoir sacrément dérivé de nos origines quand on l’a terminé. Mais c’est un sentiment exaltant. C’est comme de finir une dissert’ de philo, d’arriver à la conclusion en te disant : « Wow, je pensais pas que j’arriverais jusque ici ».
Quelles sont vos influences principales pour vos compos ?
Hugo : Alors là franchement, je crois qu’on s’influence de tout ce qui est bon ! Le monde est rempli de belles choses alors on s’en sert. Et puis, habiter à Paris, c’est plutôt une chance pour se nourrir l’esprit. On écoute pas mal de trucs qui nous ont emmené ailleurs ces temps-ci : François & the Atlas mountains, BRNS, Jungle, Jaws, ou encore Yumi Zouma, ce sont de groupes qui nous donnent du grain à moudre.
Jon : Après, écouter ces artistes et les vivre comme une influence, ça ne veut pas dire que tu retrouveras des choses précises qui y font référence dans nos morceaux. C’est encore plus le cas lorsque nous écoutons Fela Kuti, ou l’Orchestre Poly-rythmo de Cotonou. Nous ne pouvons pas du tout jouer ce que ces artistes jouent tant ils sont singuliers et nous ne voulons surtout pas. Mais il est bien là question de se nourrir la cervelle pour faire des choses qui nous ressemblent ensuite.
De quoi parlent vos morceaux ?
Fred : On peut dire qu’on parle souvent de l’ailleurs. On te le disait précédemment, l’Afrique nous fascine énormément. Et on en parle beaucoup dans nos morceaux. Je crois que, malgré nous, on ne peut pas être plus actuels avec ce qui se passe au Mali, en Centrafrique, en Guinée, ou même au Kenya. L’Afrique, c’est un continent de génie où se concentrent tous les extrêmes. À la fois la beauté du monde la plus implacable mais aussi les pires horreurs. Je suis allé au Burkina Faso il y a quelques années, c’est l’une des expériences les plus marquantes de ma vie.
Arthur : On a d’ailleurs intitulé un de nos nouveaux morceaux « Conakry ». Il parle de ce décalage de perception que l’on peut avoir de l’Afrique lorsque l’on vit en occident. En Occident, on vit l’Afrique à travers l’agenda des médias le plus souvent, et ils ne relatent que des catastrophes. On avait envie de donner un sentiment doux et une interprétation de notre idée de Conakry, un ailleurs qui fait rêver dans toutes ses facettes, pas seulement une terre où Ebola fait rage.
Jon : On parle aussi beaucoup de notre jeunesse, de cette frénésie de vitesse dans laquelle nos existences sont entraînées. C’est une époque bizarre que l’on vit non ? Tout va très vite mais un peu dans tous les sens aussi. C’est de plus en plus dur de se faire une place, et en faisant de la musique, nous sommes aux premières loges pour nous en rendre compte.
Solidays a été pour nous un grand moment. […] quand on a vu 3 000 personnes devant nous qui ont hurlé quand on est arrivés sur scène, c’était une récompense ultime.Arthur
Vos clips sont originaux et assez différents les uns des autres, comment avez-vous trouvé toutes ces idées ?
Fred : Alors là, on tire notre chapeau à nos amis Nicolas Davenel et Thomas Delebecque qui les ont réalisés pour le collectif Ouicheaters. Ces types ont le cerveau en fusion (rires) !
Hugo : C’est vraiment cool d’avoir pu collaborer avec eux, on a beaucoup appris à leurs côtés. Et depuis, ils ont fait de super belles choses. Nico a tourné pour Birdy Nam Nam, Pegase, Brodinski et Thomas avec son nouveau collectif O.S.A.K.A.H a récemment sorti le clip de « Mirages » pour Saycet.
A quoi ressemble une journée type de votre groupe ?
Jon : Je crois qu’il n’y a pas vraiment de journée type. Mais quand nous répétons, c’est une journée type. On répète dans le même local que nos potes Birdy Hunt. On se lève tôt . . .Tout le monde nous prend pour des fous. On ne commence jamais une journée de répétition après 10h.
Votre meilleur souvenir de concert ? et le pire ?
Jon : Bon ben moi, je commence par le pire puisque tout le monde sait déjà ce que je vais dire. C’était à la Grande Halle de la Villette pour le Be Street weeknd (rires) ! Pourtant c’était une date super, mais quand ça ne veut pas, ça ne veut. J’ai dû me planter sur l’intro de 3 ou 4 morceaux de suite, j’étais pas là !
Arthur : On vit très souvent les concert différemment mais nous avons plusieurs concerts où l’on a été unanimes. Solidays a été pour nous un grand moment. On avait beaucoup de pression derrière mais en même temps, quand on a vu 3 000 personnes devant nous qui ont hurlé quand on est arrivés sur scène, c’était une récompense ultime. Alors, on s’est laissés porter.
Hugo : Après, d’autres concerts plus petits sont de super souvenirs. On a fait un concert à l’Espace Gérard Philipe de Fontenay-sous-Bois qui fait partie de l’un de nos plus fous ! Il y avait une ambiance de stade (rires) ! Le Gala de Centrale à Lyon, c’était bien drôle aussi. On jouait dans un château devant pas mal de mecs ivres. Bon souvenir !
Quelles chansons écoutez-vous en boucle en ce moment ?
Fred : Moi j’ai pas mal rodé « Cut the crap » d’Etienne de Crécy ces derniers temps. Il faut dire que Super Discount 3 est assez énorme !
Jon : Alors moi, tout le monde se moque parce que je suis tombé in love d’un chanteur de Folk américain qui s’appelle Sean Rowe. Une putain de voix à la Barry White et des chansons écrites magnifiquement. Le titre « The Game » tourne clairement en boucle chez moi !
Arthur : Moi je suis sur Future Islands. Je ne m’en remets pas depuis La Cigale de la semaine dernière. Le titre « Seasons » est une folie !
Hugo : Pour moi, le « Walking with éléphants » de Ten Walls est une vraie tuerie !
On passe notre temps à écouter de la musique et aussi à se la faire écouter. Du coup, on s’alimente les uns les autres quasi tout le temps et c’est aussi ça qui nous fait avancer. Jon
Quelles sont vos prochain(e)s projets/actus ?
Jon : Demain soir, vendredi 10 avril, pour parler à très court terme, nous jouerons à la Flèche d’Or avec les groupes Stamp et Wunderland. On est hyper contents de retrouver la scène par là-bas, c’est une salle qu’on aime beaucoup. Depuis 1 an, on s’est délibérément écartés du live pour se concentrer sur de nouveaux morceaux et vraiment prendre du temps pour jouer, sans pression. Là, nous sommes tout juste dans la phase où l’on sort de notre hibernation créative !
Fred : On pense aussi se diriger vers un studio très bientôt. On ne peut pas en dire plus pour le moment, mais c’est au programme ! Et surtout du live du live du live ! On attend la confirmation pour des dates à venir.
Arthur : On a aussi bossé sur pas mal de choses en parallèle : de la musique pour de la pub, des remix. On en a d’ailleurs fait un pour Jay Jay Johanson que l’on vient de lui envoyer. On espère que ça lui plaira !
Un autre petit groupe français à nous conseiller ?
Arthur : Oh il y en a plein . . . Allez j’en cite plusieurs mais qui ne sont pas vraiment « petits » remarque. Griefjoy, Isaac Delusion, François and the Atlas mountains ou Jumo . . . On a de bons groupes ici !
Si le groupe était un fromage ?
Hugo : Un truc un peu chic et choc qui s’exporte partout . . . de la « vache qui rit » ?
Un spot en France où vous aimez aller le week-end/en vacances quand vous ne jouez pas ?
Jon : La forêt de Fontainebleau, c’est un très bel endroit et ça n’est même pas à 1h de Paris. Tu peux vraiment faire le vide quand tu te promènes là-bas. Et puis autour tu as des petits villages impressionnistes. c’est vraiment charmant !
Merci les gars !
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Crédit photos : Sasha Marro