On avait rencontré Gauthier et Romain du projet “Aventure & Vous” l’année dernière, peu de temps avant leur grand départ pour l’Amérique du Sud en mobylette. De retour au pays, des images fabuleuses plein la tête et des histoires à revendre, ils nous racontent leur périple de neuf mois !
Voici leur chronique :
Grâce à notre mob, on avait ce côté frenchy que tous les gens adorent.
Comment tout a commencé. . .
“Tout a commencé un matin d’été il y a sept ans. On avait 18 et 19 ans quand on s’est lancés dans notre premier périple : la Corse à vélo en claquettes et maillot de bain. On était vraiment à l’arrache au point de ne pas savoir que cette île était montagneuse. Très montagneuse ! Les années ont défilé, les voyages itinérants aussi. L’Espagne et le Portugal sans un sou, l’Aquitaine à vélo et toujours en claquettes. Et on en passe des biens bonnes. . . Oui mais voilà, diplômes obtenus c’est pendant une soirée bien arrosée qu’on s’est décidés à passer le cap.
« – Mec, on se doit de terminer par quelque chose de grand, qui nous ressemble.
– Je suis chaud et surtout saoul donc si tu as une idée c’est maintenant que tu dois me la dire !
– Mec, ça te dirait qu’on parte à l’aventure ?! Une aventure comme on sait les faire ?!
– Chaud ! Qu’est ce que tu penses de se faire l’Amérique du Sud ?
– Go ! Et si on se faisait l’Amérique du Sud en Peugeot 103 !!
– P.A.R.F.A.I.T !! Mais au fait. . . C’est quoi une Peugeot 103, un 4×4 . . .?»
Voilà comment est née Aventure & Vous. Un périple en mobylette de neuf mois aussi farfelu que ses deux protagonistes. Certains noteront la ressemblance avec le film retraçant l’itinérance motorisée du Che, « Carnet de voyage ». C’est équipés de ces deux roues au look rétro qu’on a traversé le Brésil, le Pérou, la Bolivie et le Chili pendant 13 000 kilomètres et pas un de plus. On s’est laissé balader au fil des rencontres, des kilomètres parcourus, des décors hors du commun ou des divers accidents ou pannes pendant le voyage !
On ne voulait pas rendre les armes, alors on a terminé notre voyage en vélo parcourant pas loin de 2 000 kilomètres le long des routes Argentines. Comme on n’était pas des cyclistes hors pair, on a achevé ce voyage à Ushuaïa, ville la plus au sud de notre planète, par une grosse araignée de mer et plusieurs bières pour fêter le tout.
Le soir, tu ne sais jamais où tu vas atterrir ni ce que tu vas manger.
Et voici notre expérience en Amérique du Sud . . .
Quand on est arrivé sur le sol sud-américain, nous avions plein de clichés en tête. On pensait débarquer dans un continent dirigé par les cartels de la drogue, se faire attaquer sur la route par des serpents et araignées géantes et gravir les montagnes vertigineuses des Andes avec nos mobylettes. Beaucoup de ces images que nous avions en tête étaient pour le moins exagérées mais certaines étaient un peu fondées.
La chaleur
Si on devait définir l’Amérique du sud et plus particulièrement le Brésil en un mot, ce serait à coup sur celui-ci : la Chaleur ! Entre la chaleur humide de l’Amazonie ou sèche du nord-est, on a été servis. Insolations, évanouissements et coups de soleil, c’était notre petite routine. Mais la vraie chaleur de ces pays se retrouve dans leurs habitants.
La mobylette a été notre passeport pour les rencontres !
C’est au Brésil que nous avons eu nos expériences les plus marquantes avec les locaux. Ils sont fous mais dans le bon sens du terme. Ils ont cette insouciance et cette façon de voir la vie qui fait que tu tombes direct sous le charme des habitants des petits villages qu’on a traversé.
Un soir, après avoir joué au foot avec des gamins, mangé à l’œil dans un petit snack, on s’est retrouvés on ne sait trop comment embarqués dans une ferme pour une soirée moto et cachaça, l’alcool local brésilien. On peut aussi parler de cette réunion de bikers à Sao Louis où nous avions été reçus en véritables stars du deux roues. On n’oubliera pas de sitôt tous ces moments avec les Brésiliens.
Les bateaux lents remontant l’Amazone
On s’attendait à être dépaysés, on n’a pas été déçus. On se doit de parler de ces bateaux lents qui remontaient l’Amazone. L’enfer des tropiques, comme on aimait le dire.
Mais la vraie chaleur de ces pays se retrouve dans leurs habitants.
On vous plante le décor : trois semaines passées dans des bateaux type embarcadères de fortune sans véritable occupation si ce n’est que de regarder ce mur vert qui se dresse devant. Le tout allongés dans un hamac de fortune à enchainer les siestes. En fait, tu plonges dans une sorte d’hibernation. Le temps s’arrête et tu deviens un membre de cette communauté de personnes voyageant sur l’Amazone. Les repas, les parties de dominos et les bières au coucher de soleil se partagent avec les habitants. A la fin du voyage, tu connais ton voisin de droite, de gauche, de haut et de bas. Les bateaux étant petits, chaque espace est rentabilisé à son maximum. Dit comme ça, vous pourriez être tentés mais on vous assure, trois semaines, c’est long.
Les routes vertigineuses du Pérou et de la Bolivie
Ces dernières sont sinueuses dans les Andes et surtout elles montent haut, encore plus haut que ce qu’on avait pu imaginer. Notre passage à 4 818 mètres fut le plus spectaculaire et inattendu. Après deux jours de montée, on se doutait bien qu’on était haut mais pas qu’on passerait avec nos mobs plus haut que le Mont Blanc. Ce furent deux jours plutôt cyclistes dira-t-on. Le moteur étant dépassé par une telle altitude, on a du finir à la pédale et à pieds. Ce fut le premier d’une longue série de cols hallucinants.
La vie commence dans cette région du monde autour des 3 000 mètres d’altitude, c’est-à-dire pour nous au moment où les mobs commençaient a vraiment souffrir. Les enfants des villages aimaient bien faire la course avec nous sur leurs vélos de fortune. C’est encore dur de l’avouer pour nous, mais nous avons systématiquement perdu.
Les Français et la France sont très bien vus en Amérique du Sud. Les personnes de la génération de nos parents chantent du Edith Piaf pendant que les routiers nous parlent de Napoléon
L’Aventure au quotidien, notre motivation du voyage
Tu es acteur de ce que tu vois puisque tu évolues à une vitesse « humaine », ta mob s’adapte et réagit à toutes les routes que tu empreintes. En montagne tu fais du sport en pédalant, en Amazonie tu comptes les kilomètres avant le prochain arrêt pour te désaltérer avec une bonne bière et en Patagonie tu te réchauffes comme tu peux avec ton pot d’échappement.
Au détour d’une rencontre sur le bord de la route, tu vas jouer avec les gamins des villages, faire une partie de billard ou alors parler sur nos différences culturelles. Et puis le soir, tu ne sais jamais où tu vas atterrir ni ce que tu vas manger. Un soir tu te retrouves chez l’habitant, un autre sous la tente ou dans une maison abandonnée. Le lendemain, tu repars sur la route et tu te dis que tu vis vraiment ton rêve.
Les clichés sur les Français
Petit cocorico pour commencer. Les Français et la France sont très bien vus en Amérique du Sud. Les personnes de la génération de nos parents chantent du Edith Piaf pendant que les routiers nous parlent de Napoléon. Les jeunes nous louaient les qualités techniques de Zizou balle au pied. Et les jeunes filles nous parlaient du pays de l’amour.
Evidemment tu as les préjugés que tout le monde connaît du style : “Le Français ne se lave pas tous les jours”. Entre les douches glacées du Pérou et les trajets de plusieurs jours au sud de l’Argentine pour rejoindre une ville, on n’a pas aidé à changer cette vision. On peut le dire, on empestait ! Mais ça n’empêchait pas les mères de famille péruviennes de nous proposer leurs filles en mariage à chaque passage dans les petits villages.
Cette itinérance nous a quand même poussés dans nos retranchements
Les choses qui nous ont le plus manquées
Grace à notre mob, on avait l’impression que la France voyageait avec nous. On avait ce coté frenchy que les gens adorent. Vous pouvez être sûrs que dès qu’un véhicule français nous doublait, et pas l’inverse, il s’arrêtait de suite !
C’est au final plus des personnes qui nous ont manqué que des choses. Cette itinérance nous a quand même poussés dans nos retranchements. On a essuyé pas mal de coups durs et c’est dans ces moments là que tu te dis que ta famille et tes proches te manquent. Mais tu tournes la tête, tu regardes ton pote avec qui tu vis un truc de dingue et tu te dis que tu es chanceux de partager ces moments si forts, si beaux et si durs en même temps. Tu rigoles un grand coup, le coup de mou est passé et tu repars gonflé à bloc.
Après, l’objet qui nous a le plus manqué c’est un rasoir ! Allez expliquer en espagnol à un barbier qu’avec votre pote vous faites un style de barbe par pays. Au début, expliquer la moustache a été simple, mais les rouflaquettes ou le collier c’est d’un tout autre niveau. À la fin on faisait peur aux filles ! Tous les soirs avant de dormir, on aimait se rappeler les petites choses de notre vie française. Rom s’imaginait glisser en snowboard dans la neige fraîche des Alpes pendant que Gauthier se voyait jouer au tennis en tournoi comme il aime tant le faire.
On ne pouvait pas rêver d’une aventure plus belle.
La bonne raison d’avoir traversé l’Amérique du Sud en mobylette
Les rencontres. C’était notre rayon de soleil quotidien. C’est sûr que la mobylette a été notre passeport pour les rencontres. Si on conjugue le look rétro de nos mobs à nos styles pour le moins décalés on obtient quelque chose de neuf, de rafraichissant. Petits, grands, business men ou agriculteurs, beaucoup se sont arrêtés à nos cotés pour partager des moments privilégiés. Partager le soupé au Chili, manger un barbecue avec un réparateur ou se prendre des petits ponts par des jeunes Brésiliens au foot, tout ça on le doit à nos mobs !
C’est incroyable comme ces drôles d’engins ont pu adoucir le regard des gens que l’on a croisé. On avait l’impression qu’ils redevenaient tous gamins. Nous on était des cavaliers un peu farfelux, mais nos mobs, des vraies starlettes les petites !
Trois anecdotes qu’on n’oubliera pas de sitôt
En pleine traversée du désert du salar d’Uyuni et du sud Lipez en Bolivie, la mob de Gauthier décide de rendre l’âme. Nous sommes au milieu de nul part, à trois jours de notre ville de départ Uyuni en Bolivie et à 30 kilomètres de notre ville d’arrivée Ollague au Chili. C’est dans ces moments-là que tu dois être fort.
Résultat : nous avons dû pousser la mob de Gauthier pendant 12 heures jusqu’à la frontière sans eau ni nourriture dans ce désert vide d’homme et dépourvu de route. Gauthier a complètement craqué et s’est mis derrière un rocher pour pleurer quand soudain une voiture est finalement sortie de nulle part pour nous sortir de ce mauvais plan. A la frontière, on a trouvé une mama bolivienne qui vendait des plats dans la rue. La pauvre, on était tellement affamés qu’on lui a retourné son stand à la façon Les Visiteurs.
On s’est retrouvé à chanter “La souris verte” devant tout le Brésil.
Notre dernier trajet Ushuaïa – Buenos Aires, on a décidé de le faire en stop. Un trajet de 3 000 kilomètres à faire en cinq jours pour attraper notre vol retour. Après des débuts calamiteux les trois premiers jours, un camionneur nous embarque et nous assure qu’il va nous monter jusqu’à notre objectif. Finalement quelques heures plus tard nous voilà au milieu de nulle part, déposés gentiment par notre camionneur surement saoulé par nos histoires et notre hygiène douteuse. On était au fond de seau à ce moment-là.
Quand tout à coup, un vieux pick-up avec David à l’intérieur. Touché par nos styles « ramasse » il nous propose de nous déposer 40 km plus loin à son village ou sa femme l’attend pour le repas. On commence à lui raconter nos histoires, à rire ensemble et le contact passe. Plus rien ne l’arrête, il veut nous amener plus loin que les 40 km prévu. On fera ce jour-là 800 km avec lui. Un petit détour qui n’a pas vraiment dû faire plaisir à sa femme.
Pour finir, un moment dont on n’est pas vraiment fier. Alors qu’on conduisait tranquillement nos mobylettes au Brésil, une équipe de journalistes télé nous arrête pour faire un petit reportage sur nous. Tout se passe très bien jusqu’à la question : « Pouvez vous nous chanter une petite chanson française ? » Un gros trou de mémoire. C’est comme ça qu’on s’est retrouvés à chanter “La souris verte” devant tout le Brésil. On vous promet que la prochaine fois on rendra ses lettres de noblesse à la chanson française.
Et maintenant ?
On ne va pas repartir tout de suite. Le retour à la vie française se fait en douceur. On aime tellement notre pays qu’on est super heureux d’être de retour, de voir nos proches et de retrouver un quotidien plus confortable. On ne pouvait pas rêver d’une aventure plus belle. Pour la suite, on va participer au festival Rock’a’bylette cet été pour parler de notre voyage. On a aussi tenu un carnet de bord tout le long du voyage. On travaille dessus pour réussir à relire nos écritures car il retrace toute notre histoire sur place pour que les gens qui sont intéressés puissent en savoir plus.
Et puis ce n’est pas l’amour pour nos mobylettes qui va payer nos factures. Donc on recherche des nouveaux projets pour la suite tout essayant de garder le brin de folie qui nous a accompagné ces derniers mois !”